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Management en multiprojet – 1ère partie

18 juin 2020

1. Emergence d’un management en multiprojet

De façon générale, les projets en entreprise sont de plus en plus nombreux, s’interpénètrent et mettent en jeu des acteurs de métiers différents, dont certains sont externes à l’entreprise. Dans ce contexte, il devient impératif de mettre en place une gestion spécifique et claire de tous ces projets.

Dès le début des années 2000, des stratégies d’innovation intensive se généralisent et ce, dans de nombreux secteurs y compris dans des contextes matures comme ceux de l’automobile ou de l’aéronautique. Ces stratégies se caractérisent à la fois par une multiplication et par une radicalisation des ruptures dans les renouvellements de produit. Le management de projet, déployé dans les années 1990 en Europe, atteint alors ses limites en efficacité et réponse à ces nouveaux besoins. En effet, ce mode de fonctionnement organisait la convergence sur des cibles de valeur relativement bien identifiées. Actuellement la demande est de piloter les divergences d’exploration, de contrôler un foisonnement de projets de plus en plus problématique, de mutualiser des coûts de recherche et développement en pleine explosion.

De fait, le management multiprojet devient un enjeu de plus en plus fort et stratégique pour une plus grande maîtrise d’une visibilité de fonctionnement des entreprises. Les ressources étant limitées, il convient de savoir gérer un ensemble de projets ayant des enjeux différents et à des stades d’avancement divers. Planifier, établir les rôles et les responsabilités de chacun, arbitrer et communiquer sont les clés du management multiprojet. Avant toute chose, positionner un mode de fonctionnement en multiprojet oblige à rappeler le contexte de tous les projets dans une entreprise.

2. Clarifier ce qui est projet dans l’entreprise

Opérations quotidiennes d’une entreprise et projets ne cohabitent pas toujours aisément. Si le but poursuivi est le même, autour de la de création de valeur, leur nature diffère. L’opération, la fonction se réalise dans le court terme alors que le projet répond plus souvent à des objectifs de changements, qui entraînent une action à court, moyen et long terme. En complément aux caractéristiques du projet sous les aspects « unique » et « temporaire », cette différence supplémentaire dans la réalisation des actions est régulièrement à l’origine de conflits ou de dysfonctionnements dans l’entreprise. De plus, la fonction est généralement sûre dans le court terme, alors que le projet par lui-même sous-tend nécessairement un degré de risque.

Sans remettre en cause la nature et la mission de la fonction, le projet au contraire, l’articule et la définit en actions concrètes. Une définition d’une stratégie pour la performance des projets, passe par la précision du cadre de référence et du contexte de développement optimal des opérations et des projets. Ces derniers complètent et renforcent les fonctions en supportant les changements nécessaires au développement de l’entreprise donc au développement de ses fonctions.

Si les projets sont des vecteurs qui supportent le changement, ils n’en sont pour autant les garants de sa réussite. Initier des projets ne suffit pas pour changer. Non maîtrisée, cette multitude de projets mène généralement à des résultats inverses à ceux recherchés. En définitive se sont toujours les ressources qui réalisent les activités et la profusion de projets engendre une forte perte d’efficacité des fonctions. Ceci conduit irrémédiablement à une mauvaise intégration des changements attendus.

La surcharge de travail de certaines ressources trop sollicitées, les difficultés à tenir les budgets fixés en début d’année, le sentiment fréquent dans les entreprises que le cap stratégique n’est pas tenu, représentent trois dérives issues d’une absence ou d’une mauvaise définition du rôle des projets dans l’entreprise. Peu d’entreprises maîtrisent le nombre de projets en cours dans leur organisation. Il arrive pourtant fréquemment que le dénombrement des projets soit sans commune mesure avec le nombre de salariés.

2.1 Tous les projets de l’entreprise

Recenser les projets

Répertorier le nombre de projets permet de photographier à un moment donné de son histoire, l’état dans lequel l’entreprise se trouve et donc dans un premier temps, de mieux appréhender son point de départ pour résoudre ses défis. Le recensement du nombre et la performance des projets dans son organisation, fait prendre conscience à la Direction qu’elle doit s’organiser différemment pour obtenir les résultats attendus à court et moyen terme.

Bon nombre d’entreprises gèrent de front:

  • le développement ou l’optimisation de son outil de gestion globale, ERP,
  • l’évolution de son référentiel qualité à la norme ISO 14000, démarche de mise en conformité environnementale,
  • la fusion ou l’acquisition d’une autre entreprise,
  • un pacte « social » permettant de retenir des ressources difficiles à recruter,
  • le développement de nouveaux produits et/ou marchés,
  • l’introduction de nouveaux outils de production, …

Autant de nouveaux domaines à explorer et de problématiques à résoudre bien souvent de façon simultanée. Autant d’instabilité et de complexité avec laquelle l’entreprise et ses ressources doivent apprendre à composer. La réussite de ces projets demande à mettre en oeuvre des efforts dépassant le cadre classique de l’organisation basée sur une structure hiérarchique.

La quantité croissante du nombre de projets et le faits qu’ils sont de plus en plus stratégique oblige à se demander si la réussite du changement a ses meilleures chances au sein des fonctions ou bien si l’entreprise doit repenser son organisation, en créant un espace différent pour le développement de ses projets. En montrant sa capacité à organiser simultanément le court terme -autour de ses opérations- avec le moyen et long terme -autour de tous ses projets- l’entreprise relève le défi que lui impose le contexte actuel.

Vision projet élargie

Faire de son entreprise une organisation souple qui réponde aux visions court, moyen et long termes, demande à déployer bien plus que de bonnes pratiques de gestion de projets.

De fait, la gestion de projets vise à structurer et à améliorer la performance d’un seul projet. Réaliser les performances les meilleurs au moindre coût avec un management au plus juste (lean management) s’accommode mal de la complexité que représente une vision de tous les projets. Tout ce qui est supérieur au projet (la stratégie globale de l’entreprise) ou parallèle au projet (les autres projets menés conjointement au sein de l’organisation) risque d’être négligé, ignoré voire, pire encore, combattu.

Le management par projet professionnalise la gestion de l’ensemble du portefeuille des projets d’une entreprise (portfolio). La gestion de projet est une méthodologie et un outil du management par projet. Ce dernier définit une approche et un ensemble de moyens organisationnels qui engendre un changement important au niveau de l’entreprise.

Les organisations matricielles ont professionnalisé la notion de projets en amenant les différentes fonctions de l’entreprise à collaborer entre elles. En plaçant les projets au cœur des changements et en faisant en sorte d’optimiser ces changements dans l’ensemble des activités de l’entreprise permet d’avoir une vision multiprojet. Cette vision offre la particularité de recueillir l’adhésion de beaucoup d’acteurs dans l’entreprise parce qu’elle donne un sens opérationnel au changement.

2.2 Approche multiniveau du mode projet

Cependant, définir clairement ce qu’est un projet et sa place dans l’organisation est insuffisant pour avoir une vision complète du mode projet. Plusieurs composantes sont à prendre en compte pour obtenir une vision globale qui permette de lier entre eux les différents niveaux qui structurent l’entreprise.

En effet, si la définition d’un projet pose le contexte de l’échange entre les fonctions et les projets, la notion de pilotage des projets s’effectue en « monoprojet » au niveau opérationnel. C’est un processus qui permet de définir et de parcourir de manière rigoureuse le chemin permettant d’atteindre les objectifs fixés projet par projet.

En intermédiaire, la « gestion en multiprojet » représente le niveau tactique qui, par une application des priorités, va permettre d’aligner la performance recherchée dans les projets ce qui implique la mise en place de comportements et de moyens pour assurer un cadre de développement stratégique à l’ensemble des projets.

Le niveau stratégique permet le pilotage d’ensemble des projets, la gestion du portefeuille des projets, non pas dans le détail mais de façon complète pour avoir une vision globale à long terme de tous les projets de l’entreprise.

Les trois composantes :

  • Monoprojet : analyser clairement ces aspects est indispensable pour différencier les approches aux différents niveaux.
  • Multiprojet,
  • Portefeuille projet,

sont fondamentales pour adapter son organisation à la turbulence des environnements d’aujourd’hui. Effectuer un recentrage sur les métiers fondamentaux de l’entreprise assure un ancrage projet/fonction.

Analyser clairement ces aspects est indispensable pour différencier les approches aux différents niveaux.

Article rédigé par Patrick Bourdichon

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